N Engl J Med. 2015;372:735-46.

Titre original : 
Medical therapy for pediatric vascular anomalies
Titre en français : 
N Engl J Med. 2015;372:735-46.
Auteurs : 
Margolin JF, Soni HM, Pimpalwar S
Revue : 
Seminars in Plastic Surgery. 2014; 28 :79-86.

Traductions & commentaires : 
Sophie Blaise pour le Groupe Malformations Vasculaires SFMV.



Les malformations vasculaires comprennent un large panel de présentations cliniques impliquant de nombreuses spécialités médicales.

Le médecin vasculaire est souvent impliqué dans la phase diagnostique, notamment lors de la réalisation de l’écho-Doppler, mais également dans les décisions thérapeutiques.  Sa présence est conseillée au sein des comités multidisciplinaires de prise en charge des malformations vasculaires. Outre les problématiques de compression médicale et de sclérothérapie, le médecin vasculaire doit être informé des possibilités des traitements médicaux dans certaines indications.

Cet article passe en revue un certains nombres de molécules pharmacologiques discutées dans les tumeurs ou malformations vasculaires.

 

Le problème de la description et de la classification des malformations vasculaires reste toujours d’actualité. Un auteur a été capable de relever dans plus de 70% des articles de la littérature publiés en 2009 un usage incorrect du terme d’« hémangiome ». La classification des malformations et tumeurs vasculaires utilisant le système ISSVA (International Society for the Study of Vascular Anomalies*) est indispensable.

 

Les traitements médicaux incluent les molécules et procédures ayant pour objectif de contrôler la prolifération cellulaire ou la croissance anormale, ainsi que les traitements ayant pour objectif d’éviter les complications d’hémostase ou générales (douleur, saignement, thrombose, infection, anémie).

 

Les décisions médicales peuvent porter sur :

-                      Les indications de biopsies tissulaires qui peuvent être retenues pour un diagnostic certain. Elles sont formellement indiquées, sauf contre-indication, avant d’instaurer un traitement cytolytique ou immunosuppresseur.

-                      Le choix et la surveillance de la dispensation de la chimiothérapie et la coordination des soins lors de traitements combinés

-                      La délivrance d’un traitement anticoagulant ou de médication générale (antalgiques, etc.)

 

Les traitements discutés dans l’article sont essentiellement indiqués dans les tumeurs vasculaires hors hémangiomes ainsi que dans les malformations artério-veineuses réfractaires aux traitements chirurgicaux ou endovasculaires.

Les cas particuliers des malformations lymphatiques et du blue rubber bleb nevus syndrome (BRBNS) sont abordés.

 

LES TUMEURS VASCULAIRES

 

Excepté les hémangiomes infantiles, elles sont globalement considérées comme rares.

 

L’incidence de l’HEMANGIOENDOTHELIOME KAPOSIFORME est estimée à 0.071 cas pour 100 000 enfants. La présentation clinique peut être trompeuse avec l’hémangiome infantile, mais l’histoire de la maladie et l’histologie sont totalement différentes. Elle correspond le plus souvent en une tumeur unique d’une extrémité ou du torse ou du rétropéritoine (parfois néanmoins plusieurs lésions), infiltrant profondément (au-delà de la peau à l’inverse des hémangiomes infantiles).

La complication la plus grave et parfois mortelle est le syndrome de Kasabach-Merritt (SKM). Pendant plusieurs années, le SKM était traité par chimiothérapie par vincristine et des doses modérées à élevées de glocucorticoïdes (2 à 4 mg/kg de prednisolone). Ce schéma était considéré comme répondeur chez 70% des patients. Ce traitement d’une durée le plus souvent de 6 à 18 mois n’est pas dénué d’effets secondaires comme la neuropathie, les crises d’épilepsie, la constipation. La biopsie est indispensable avant un traitement par chimiothérapie et l’exérèse chirurgicale doit être envisagée si complète et non délabrante.

Dans la littérature, on retrouve certains cas de SKM traités par sirolimus (rapamycine, un potentiel inhibiteur de mTOR, qui est une sérine/thréonine kinase régulée par la phosphoinositide-3-kinase, impliquée dans la motilité cellulaire, la croissance cellulaire et l’angiogenèse). Ce traitement est un immunosuppresseur utilisé dans la prévention des rejets de greffe d’organe qui doit être étroitement surveillé et combiné avec un traitement préventif de l’infection à pneumocystis. La posologie optimale du sirolimus n’est pas connue.

Certains auteurs considèrent que le propanolol pourrait être efficace en traitement associé dans les SKM (à ne pas utiliser en traitement seul). Le débat reste controversé.

 

L’ANGIOME EN TOUFFE

 

Sa forme clinique est proche du SKM notamment chez l’enfant de moins de un an avec une histologie différente. Les traitements proposés vont être les mêmes que dans le SKM qui lui est parfois associé. Le traitement est donc chirurgical si l’exérèse totale est non délabrant, sinon, une chimiothérapie par vincristine associée à une corticothérapie est souvent utilisée. Le propanolol est parfois proposé en association. La littérature retrouve certains succès avec l’association de la vincristine, l’aspirine et la ticlopidine mais aucun cas dans la littérature n’a été retrouvé de réponse avec le sirolimus.

 

LES MALFORMATIONS VASCULAIRES

 

BRBNS (blue rubber bleb nevus syndrome)

 

C’est une entité rare de 200 cas environs publiés dans la littérature, sans taux de l’incidence retrouvé. Certaines lésions sont indolores. D’autres sont douloureuses et peuvent surtout se rompre spontanément, induisant des hémorragies ou des anémies par spoliation sanguine chronique. 

D’autres complications peuvent être une coagulopathie de consommation, des douleurs abdominales par volvulus, infarctus intestinal voire choc hémorragique. De rares cas de complications orthopédiques sont décrits ainsi que des complications thrombo-emboliques.

Certains traitements pharmacologiques ont été décrits dans le BRBNS tels que les corticoïdes, l’interféron-a, la thalidomide et plus récemment le sirolimus.

Ces décisions doivent être prises uniquement dans le cadre de comités multidisciplinaires. Aucun traitement n’est curatif. Des traitements associés tels que les transfusions sanguines, des agents anti-fibrinolytiques ou anticoagulants peuvent parfois être discutés.

 

MALFORMATIONS LYMPHATIQUES

 

Si les formes macrokystiques sont souvent traitées chirurgicalement ou par sclérothérapie, toutes les lésions ne répondent pas au traitement et surtout pas les formes microkystiques.

Certains cas ont été publiés comme répondeurs à un traitement par sirolimus ou d’autres traitements immunosuppresseurs comme l’interféron. Certaines chimiothérapies peuvent être proposées dans des formes syndromiques (syndrome de Gorham-Stout* par exemple).

 

 

Ainsi il faut savoir évoquer la possibilité de certains traitements pharmacologiques dans certains cas de tumeurs ou de malformations vasculaires le plus souvent rares. Il est important de valider les indications au sein de comité de concertation et de colliger les cas dans des registres du fait de la rareté des indications et des difficultés d’appréciation de leur efficacité, surtout lorsque les traitements sont combinés.

 

 

*cf. Dossier FMC : Tumeurs et malformations vasculaires. LMV 24, Sept 2013.